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Sécurité alimentaire au Cameroun: état des lieux

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Le ministère de l’Agriculture et du Développement rural a choisi de vous entretenir sur la situation de la sécurité alimentaire au Cameroun. Il nous a paru important de rendre compte des résultats de la première analyse réalisée dans notre pays, de ce qu’il est convenu d’appeler le Cadre Harmonisé d’identification des zones à risque d’insécurité alimentaire.

Oui, il s’agit d’un moment important dans ce domaine, au niveau national. Pour la première fois, en effet, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural est en mesure d’indiquer, avec assurance et davantage de précision, les zones à risque et les populations en situation d’insécurité alimentaire dans les 04 régions dites vulnérables au Cameroun, conformément à la terminologie adoptée au plan international.

Comme vous le savez les questions de sécurité alimentaire restent et demeurent un enjeu majeur pour notre pays, le Cameroun, qui fait face à une combinaison de facteurs d’insécurité alimentaire. Ces facteurs sont principalement (i) les effets néfastes des changements climatiques ; (ii) l’insécurité transfrontalière ; (iii) l’augmentation du nombre de réfugiés et déplacés internes, victimes des exactions de Boko Haram et de la guerre en RCA ; (iv) l’instabilité des revenus et la précarité des moyens d’existence des populations; (v) l’évasion des denrées alimentaires vers les pays voisins ; (vi) l’action des spéculateurs de tout bord.

Face à cette situation, qui touche à la vie des populations, au quotidien, le gouvernement de la République, à travers le ministère de l’Agriculture et du Développement. rural, avec l’appui des partenaires techniques et financiers, a entrepris de suivre régulièrement l’état de la sécurité alimentaire, pour permettre que puissent être prises des décisions appropriées et menées des actions pertinentes, et cela en temps opportun, en vue d’apporter les assistances nécessaires à celles des populations qui se retrouveraient dans la détresse.

Au tant le dire, tout de go, un nouvel outil d’analyse a été adopté, dénommé le « cadre harmonisé». Ce sont les résultats de la première analyse qui sont communiqués, ce jour. Ce nouvel outil permet de décrire la situation qui prévaut dans le pays, en précisant la nature et la sévérité des crises alimentaires, là où elles sont identifiées.

Je dois signaler, ici, pour la bonne information de tous, que l’analyse du cadre harmonisé des zones à risque et des populations en insécurité alimentaire s’est déroulée, depuis décembre 2017, dans les 19 départements de la zone septentrionale, à laquelle, s’ajoute la région de l’Est.

Il en ressort qu’au Cameroun, sur les 19 départements des Régions analysées, et grâce à cet outil, le constat a été fait que la situation alimentaire est considérée, selon les standards internationaux, comme relativement acceptable, pour les mois de mars, avril et mai 2018. Huit (08) départements (4 dans l’Extrême Nord et 3 à l’Est) sont dans la situation dite de « phase sous pression »; onze (11) en phase minimale, zéro (0) en phase de crise, zéro (0) en phase d’urgence et zéro (0) en phase de famine.

Il a, néanmoins, été relevé des tendances et des points de préoccupation qui nécessitent un suivi particulier à suivre, qui sont:

  • une hausse de plus de 38% a été enregistrée pour les prix des denrées alimentaires de base, notamment le sorgho et le maïs dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord et de l’Est; cette hausse est à mettre en relation avec l’action des spéculateurs, qui se trouvent face à une forte demande provenant des pays limitrophes (Nigeria et Tchad);
  • la production animale est perturbée du fait des zones de pâturages dégradés et des points d’abreuvement insuffisants ;
  • une dégradation des moyens d’existence des populations est observée, du fait de l’insécurité civile, des attaques de la secte Boko Haram et de la présence des personnes déplacées internes et refugiés nigérians et centrafricains;
  • les productions végétales et halieutiques sont fortement perturbées autour du Lac Tchad, à cause de l’insécurité, la diminution de la force de travail devant faire face aux variations des crues et décrues du Lac, la rareté des pluies et les poches de sécheresse.

En ce qui concerne la projection des trois prochains mois (juin, juillet, août 2018), la situation alimentaire pourrait connaître une évolution négative. Au cours de cette période, les départements du Diamaré, Mayo Rey et de la Bénoué, qui étaient en phase minimale, en situation courante, pourraient basculer en phase sous pression.

Il m’a été donné d’indiquer que cette analyse ne concerne que 19 départements de la zone septentrionale et de l’Est, considérés comme deux : «régions vulnérables».

Le Minader œuvre présentement pour que cette analyse cadre harmonisé parvienne à couvrir l’ensemble du territoire national. L’objectif à terme est de nous permettre de disposer d’une vue globale de la sécurité alimentaire dans l’ensemble de notre pays.

Il convient de préciser également, que le concept de « famine » correspond à la phase extrême de l’insécurité alimentaire, qu’est la famine. Elle caractérise la situation où, même avec l’aide humanitaire, les populations sont exposées à l’inanition, à la mort, en raison du déficit complet des denrées alimentaires et à l’effondrement quasi-total des stratégies d’adaptation et avoirs.

Sur la base de cette définition, la réalité à ce jour est que : aucune région du Cameroun ne se trouve présentement en situation de famine.

Les résultats présentés, en ce jour, avec l’outil d’analyse du cadre harmonisé, ont été obtenus grâce à l’action conjuguée et complémentaire des humanitaires, de nos pays amis et de nos partenaires au développement.

A leur endroit, je formule, au nom du gouvernement de la République, un message de remerciements pour les appuis multiformes offerts, en soulignant que notre pays va continuer à solliciter et à compter sur des appuis soutenus et renforcés, afin d’éviter des schémas catastrophes éventuels et le basculement en situation d’urgence ou en situation de famine.

Le gouvernement de la République, quant-à-lui, s’emploie à anticiper et à s’organiser pour apporter une réponse immédiate, conséquente et adaptée à chacun des départements ici concernés, qui risqueraient, en période projetée, de basculer en phase sous pression ou de crise, cela d’autant plus que nous rentrons dans une période de soudure couplée au Jeûne du Ramadan.

Nous continuerons à œuvrer pour que le défi soit relevé avec la collaboration de nos partenaires techniques et financiers, dont l’apport est demeuré constant dans la lutte contre l’insécurité alimentaire au Cameroun.

Le Cameroun, notre pays, a fait le choix, le bon choix, de s’arrimer au processus d’analyse du cadre harmonisé et dénommé :

Dispositif de Prévention et de Gestion des Crises Alimentaires (PREGEC). Il nous revient, dans cet esprit, de procéder à 04 séances d’analyse de la sécurité alimentaire par an. La prochaine analyse devra avoir lieu au mois d’octobre prochain.

Nous devons nous organiser, dès à présent, pour la collecte des données en vue de renseigner tous les indicateurs nécessaires à l’analyse cadre harmonisé. Nous le ferons, avec la contribution des différentes administrations publiques concernées et des autres intervenants identifiés sur le terrain.

Le ministre de l’Agriculture et du Développement Rural adresse, une fois de plus, ses sincères remerciements à tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à l’appropriation du cadre harmonisé au Cameroun.

Nous pensons particulièrement au Programme Alimentaire Mondiale (PAM), à l’Organisation Mondiale pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), au Comité Inter-Etats de Lutte Contre la Sècheresse au Sahel (CILSS).

La démarche engagée sera poursuivie. Les informations sur la sécurité alimentaire nationale seront maintenues disponibles.

* Henri EYEBE AYISSI est ministre de l’Agriculture et du Développement rural

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