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Nord -Cameroun : le réchauffement climatique connait ses premiers réfugiés

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AFRIQUE2010 043La rudesse du climat dans la province de l’Extrême-Nord pousse certaines populations locales à entreprendre un exil volontaire, à la recherche des territoires où le climat est plus propice à leurs activités agricole ou pastorale. Ils deviennent des réfugiés dans leur propre pays.

L’on connaissait les migrations des éleveurs nomades qui, à longueur des saisons, parcouraient le pays à la recherche des pâturages pour leurs troupeaux. Aujourd’hui, ces migrations ne concernent plus seulement les tribus nomades, mais aussi les populations sédentaires qui ont pour activité principale l’agriculture.

Les bus convoyant des migrants en provenance de l’Extrême-Nord pour la partie Nord du pays est plus visible actuellement sur les routes de cette partie du pays. Confrontées à la dureté du climat et exacerbées par le réchauffement climatique, ces populations pour la plupart agricoles sont dans l’impossibilité de survivre dans leur terroir d’origine en pratiquant leur activité. Elles se déplacent donc en masse un peu plus au sud  de la région à la quête des terres plus fertiles. Leur nombre est sans cesse en augmentation. Une augmentation plus perceptible en saison sèche.

Ibrahima Ahidjo, Premier adjoint à la Mairie de Ngong, une localité qui a déjà accueilli une bonne partie de ces gens explique que la municipalité compte 45 villages dont la population croit très rapidement à cause de « ces gens  qui se réinstallent dans cette localité en raison de la rudesse du climat dans le Grand Nord ». Ce phénomène toujours d’après Ibrahima Ahidjo, s’est accru au cours des dix dernières années.

Si les populations migrantes s’installent dans la paix, s’engagent de renoncer à la sorcellerie, plantent des arbres, il reste vrai que ces refugiés, pour créer leur champ,  brûlent les forêts en particulier pendant la saison sèche. A l’Institut de recherche agricole pour le développement (IRAD) de Garoua, l’on est  extrêmement inquiet de la situation, et même en colère contre le gouvernement. Car l’on estime que, si ici le sol n’est pas aussi pauvre que l’on croit, les pratiques sont plutôt néfastes. Ainsi après l’extrême Nord, c’est le Nord qui progressivement est voué à devenir un désert, sous l’action des populations.

Joseph Asongu de l’IRAD estime que les migrants de l’Extrême-Nord, comme leurs frères et sœurs dans le Nord, en brûlant les forêts, détruisent non seulement la biodiversité mais aussi les sols. Ils créent alors les mêmes problèmes qui ont provoqué leur départ de leur province d’origine. Par leur ignorance, il se construit alors un cercle vicieux dont les conséquences négatives pour l’environnement et sur le climat sont exacerbées. Ces conséquences deviennent  plus palpables et augmentent le nombre de réfugiés climatiques qui, progressivement,  ne peut plus être maitrisé.

C’est aussi le constat du Chef Ardou Harlidou Tchoutou de Gounougou, un village sur les rives méridionales du barrage de Lagdo, au sud-est de Garoua. Ce dernier, qui est catégorique sur le fait que ces migrants viennent tous de l’Extrême-Nord, reconnaît  qu’ils sont de plus en plus nombreux dans cette localité, que dans un passé récent.

Le Nord-Cameroun en danger

Pour le chercheur français en environnement, Michel Meneault,  les régions de Lagdo et de la Bénoué qui sont les zones les plus fertiles de la province du Nord, en partie en raison des masses d’eau présentes, ne sont pas à l’abri des changements climatiques. M. Meneault assure avoir des preuves scientifiques qui indiquent qu’en raison de la déforestation croissante à des fins agricoles sur les berges de ces masses d’eau, même le niveau de l’eau commence à baisser.

L’ennui est, assurent les experts, c’est que, personne ne semble mesurer ni l’ampleur des dégâts ni tirer les conséquences qui ont entraîné l’exode des populations de l’Extrême Nord. Et les mêmes pratiques vicieuses pour l’environnement et le climat continuent au vue et su des pouvoirs publics qui restent de marbre.

 Alain Fréjus Ngompe

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