Spécialiste de la structuration d’entreprises, Toussaint Tongo analyse les impacts de ces déchets sur l’environnement et les humains.
Quels sont concrètement les risques liés à la prolifération des déchets industriels sur le cadre de vie et la santé des populations ?
Des études ont mis en exergue l’impact du plomb sur les femmes enceintes, lors de la fusion du métal contenu dans les batteries, la contamination de la chaine alimentaire par des taux élevés de dioxines dans les œufs de poule à proximité des décharges pratiquant le brûlage à ciel ouvert de pneus et déchets plastiques, les maladies respiratoires des populations urbaines exposées aux émissions atmosphériques générées par les moteurs utilisant des carburants et lubrifiants non conformes, les intoxications dues à l’absorption de médicaments périmés, l’impact sur l’environnement liés au rejet de produits contenant du mercure(thermomètres, piles, orpaillage, lampes fluo…), le brûlage de bois traités par des pentachlorophénols pour la cuisson des aliments, l’utilisation de pesticides obsolètes et interdits dans les zones maraichage périurbains, l’utilisation de Ddt pour le séchage de poisson…
La mode du solaire avec la profusion de programmes en cours en Afrique va engendrer des problèmes sanitaires dans l’avenir, notamment en ce qui concerne les batteries qui y sont associés. Les importations de batteries au Cameroun ont presque doublé. Où finiront-elles selon vous ?
Depuis quelques mois, le secrétaire permanent du Mouvement des entrepreneurs du Cameroun (mecam) que je suis dénonce cette situation à travers une note succincte sur le DEEE que j’ai publiée sans aucun effet. Le business de l’électrification rurale (par les ONG ou les entreprises multinationales) est tellement juteux pour tous que l’on fait taire par tous les moyens ceux qui cherchent à informer. Il ne faut pas, par exemple, parler de la problématique de la gestion de la fin de vie des lampes solaires commercialisées en Afrique. Le seul but est d’électrifier un maximum de foyers avec un minimum d’investissement et que les déchets et la pollution sont négligeables devant les avantages fournis aux populations « défavorisées ». On voit bien qu’à ce stade que les choix sont faits sur des critères qui n’ont rien à voir avec le développement durable.
Vous entendez proposer au gouvernement des termes de références (tdr) d’étude pour la gestion structurée de ces déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), créatrice d’emplois et richesse au Cameroun. Quelles en sont les lignes de force ?
L’industriel James Onobiono à qui j’en ai parlé connait bien la problématique des équipements électriques et électroniques en fin de vie. L’une de nos premières actions en 2014, sera d’organiser en partenariat avec les administrations, décideurs, opérateurs économiques et acteurs de la société civile concernés, un atelier sur la valorisation des déchets d’équipements électriques et électroniques au Cameroun, qui définisse les grandes lignes de l’action projetée, dans le respect des orientations suivantes : répondre au défi aux besoins en énergie en intégrant les défis du changement climatique et des ressources naturelles, maitriser et réduire l’impact de nos activités économiques sur le cadre de vie des personnes et leur environnement, contribuer au développement social et économique local, notamment en créant de la richesse et des emplois locaux, jeter les bases d’un éco –organisme regroupant les producteurs, les importateurs et distributeurs, pour financer la filière de collecte et de traitement des DEEE, ainsi que les actions d’information, d’éducation et de communication sur la thématique.
Propos recueillis par Edouard Kingue