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L’ouest-Cameroun : le changement climatique commence à dicter sa loi

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bafoussamLe Cameroun dispose d’importantes potentialités en eau (aussi bien de surface : 267,88 km3 que souterraine : 55,98 km3). Mais, celles-ci sont en nette fluctuation depuis les années 1970 du fait de la succession des périodes sèches et humides, engendrant des crises de l’eau.

Ces crises vont s’accroitre avec des sécheresses et des inondations plus fréquentes à causes des changements climatiques. La région de l’ouest (hauts plateaux de l’ouest) l’un des châteaux d’eau du Cameroun n’en demeure pas exclu. Elle fait face aujourd’hui à de nombreuses menaces sur la qualité et/ou la disponibilité des eaux. Cette situation résulte des effets pervers du changement climatique combinés aux actions anthropiques (mauvaises pratiques agricoles et sylvicoles).

Une analyse rétrospective de l’évolution des dynamiques agraires/hydrique de la région permet de noter de grands changements dans le milieu naturel et dans les pratiques paysannes qui affectent la pérennité de la ressource hydrique dans la région. Cette menace est exacerbée dans un contexte marqué par les changements climatiques et prive en aval de nombreuses populations de l’accès à l’eau, ressource vitale, et soulève par voie de conséquence un problème de gouvernance locale de l’eau, qu’il faut absolument résoudre.

En effet, c’est une région qui constitue un refuge pour une riche biodiversité et une réserve hydrique qui a longtemps échappé à la force prédatrice humaine ou aux cataclysmes naturels. Elle est constituée de plusieurs bassins versants qui servent de collecteur des eaux de surfaces, elles même pourvoyeuses des eaux douces souterraines des régions voisines plus basses, et plus loin de plusieurs cours d’eau : Sanaga, Mbam, Mifi, Noun, Nkam, etc. Les études menées dans région nous ont permis d’évaluer l’ampleur des mutations du milieu : il y ressort que l’évolution des pratiques agro-sylvico pastorales principales activités de subsistance de la région dans un contexte marqué par des changements climatiques est de plus en plus préoccupante. Cette disponibilité est en effet perturbée par des actions qui influent sur le cycle hydrologique de la région.

Fortement ancré la culture Bamiléké et fortement demandés par les entreprises de production et de distribution d´énergie électrique et de téléphonie filaire, les poteaux en eucalyptus sont prisés et sont produits partout dans les concessions, occupent progressivement les terres agricoles et désormais, mêmes les zones marécageuses. Or ces plantations sont vivement critiquées aujourd´hui, à cause de leurs effets défavorables sur le sol (appauvrissement, érosion) et sur l´hydrologie (assèchement de la nappe, des bas-fonds et des cours d’eau). La prolifération de ces plantations est aujourd’hui pointée du doigt comme étant l’une des causes du tarissement de nombreuses sources et cours d’eau dans plusieurs villages de l’ouest Cameroun1.Les bas-fonds hydromorphes majoritairement occupés par la raphia ont toujours constitués en pays bamiléké, des espaces exclus de la mise en valeur agricole. En effet, ces types de végétation sont des indicateurs des sources d’eau douce de surface. Elles jouent un rôle écologique fondamental dans l’équilibre écologique de la zone et particulièrement dans la protection des eaux de surface par leur triple action : infiltration, filtration et protection contre l’évapotranspiration.

Les investigations montrent que 31% de bas-fonds marécageux à Touegwe, un des villages de bayaguam autrefois occupés par les plantations de raphiales ont tous été pris d´assaut par les exploitants agricoles. La destruction du couvert végétal pour faire place à l’agriculture comme on l’observe sur presque toute l’étendu des terres naturelles de l’ouest-Cameroun est l’un des facteurs qui affecte le plus la disponibilité de la ressource dans la région. Elle favorise le lessivage des sols vers les bas fonds et ralenti l’infiltration des eaux de pluie vers les nappes.

Ce rejet de contenant de pesticides (sachets et emballages plastiques) utilisés par les exploitants agricoles affecte la qualité de l´eau des nappes et des cours d’eau de la région et prive les communautés riveraines et celles en aval de l’eau potable et de consommation.

Bien que ces activités anthropiques aient des répercussions positives sur le système socioéconomique de la région, leurs conséquences sur la disponibilité de la ressource en eau aussi bien en quantité qu’en qualité sont désastreuses. Cette situation de stress hydrique aggravée par les changements climatiques affecte le quotidien les communautés de nombreux autres villages de l’Ouest.

Ces grands changements dans le milieu naturel et dans les pratiques paysannes observés à l’ouest renforcent l’intérêt et la pertinence d’une démarche de plaidoyer orienté vers les détenteurs de pouvoirs au niveau local et des acteurs publics nationaux et internationaux. L’année 2015 constitue à sans aucun doute le tournant de l’histoire. Des mesures doivent être prises pour limiter de dérèglement climatique observé et surtout proposer des solutions contextuelles et durables aux communautés locales pour améliorer leurs conditions de vie. Elles doivent tenir compte de deux contraintes antagonistes : la raréfaction sans cesse croissante et généralisée des ressources en eau à l’échelle locale exacerbée par les changements climatiques et l’augmentation exponentielle de la demande en eau surplombé par l’explosion démographique. Toutefois, parce qu’il s’agit d’adapter cette démarche au contexte dynamique des évolutions sociales de la région, des actions à entreprendre doivent constituer l’expression des communautés concernées.

Steve ZANGUE

Jeunes volontaires pour l’Environnement

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