Les déchets d’activité de soins d’origine métallique, plastique, en verre, semi ou non biodégradables ; sont « incinérés » à ciel ouvert à l’Hôpital Général de Douala. Au mépris de la protection de l’environnement et de la santé des populations riveraines.
« L’obligation d’élimination incombe au producteur des déchets. Afin de satisfaire à cette exigence, le producteur peut confier l’élimination de ces déchets à un prestataire de service ayant une expertise avérée, sous le couvert d’une convention écrite comportant un certains nombres de mentions obligatoires qui engagent les parties.» Confie le M. Bitjong Mbey Télesphore, cadre de santé- hygiéniste. A l’instar de la plupart des hôpitaux publics et de certains établissements de soins privés, dépourvus d’incinérateur, ou, plus exactement de brûloir, l’hôpital général de Douala au Cameroun, a opté pour une solution originale polluante : « l’incinération » à ciel ouvert des déchets d’activité de soins dangereux ou potentiellement infectieux.
Situé en contrebas de l’institution hospitalière, le site qui tient lieu de déchetterie recueille indifféremment les déchets d’origine métallique (seringues et bistouris), en verre (flacons vides), en plastique (cathéters, sondes gastriques…) en cartons, peut- être aussi des pièces anatomiques…
Jetés en vrac dans la nature ou « conditionnés » dans des sacs en plastique bleus, les déchets divers issus des différents services de l’hôpital ne sont pas sans danger pour les populations riveraines et l’environnement.
En effet, à l’Hôpital Général de Douala comme dans les autres établissements similaires au Cameroun, la gestion des déchets d’activité de soins n’est pas une préoccupation majeure. L’hôpital est un lieu où sont concentrées des personnes potentiellement porteuses de germes pathogènes, et, où peuvent se développer les infections nosocomiales. D’ où la problématique de l’hôpital générateur de la pollution bactériologique.
Champs de poison
De l’avis du M. Bitjong « il est interdit de mélanger aux ordures ménagères, les déchets anatomiques ou infectieux des établissements hospitaliers ou assimilés. Les déchets en provenance des établissements de soins doivent obligatoirement faire l’objet d’un tri en au moins deux catégories principales : les déchets contaminés et autres déchets non contaminés assimilables aux déchets ménagers ». Explications : il peut exister plusieurs sources de rejets d’éléments pathogènes dans un établissement de soins. Des germes bactériologiques, virales et /ou parasitaires peuvent être évacués avec les eaux vannes et les produits d’analyses de laboratoires s’il n’existe pas de systèmes de récupération ou de traitements spécifiques. Lesquels déchets contiennent des métaux lourds à l’exemple du mercure, de l’argent, du chrome, du cobalt, du nickel que l’on retrouve dans certains antibiotiques, thermomètres, sondes gastriques et colonnes des tensiomètres manuels ; ainsi que des molécules organiques à l’instar des solvants, désinfectants, détergents et des médicaments périmés ou non utilisés.
Préoccupés par la survie et ignorants du danger, les riverains de l’Hôpital Général de Douala ont trouvé en la déchetterie de l’institution sanitaire, un fumier et un sol propices à la culture du manioc, de la banane – plantain, du maïs, des légumes verts et des puits d’eau à usage domestique. Le mercure étant cancérigène, on peut imaginer les conséquences à moyen terme tant pour l’environnement que pour la santé publique. Il faut dire que dans certains cas, l’élimination des médicaments non utilisés ou périmés est faite via les éviers, vidoirs ou jetés dans la nature. En tant que spécialiste, M.. Bitjong pense que « c’est la preuve évidente de l’extrême négligence qui se rencontre dans plusieurs établissements de soins. » Pour le cadre de santé, la solution au problème passe par un travail en trois axes :
– prévenir ou réduire la production et la nocivité des déchets
– organiser le transport des déchets et le limiter en distance et en volume
– assurer l’information du public sur les effets pour l’environnement et la santé publique, des opérations de production et d’élimination des déchets ainsi que sur les mesures destinées à en prévenir ou en compenser les effets préjudiciables. Un débat qui mérite d’être lancé au même titre que celui sur les filières d’élimination des déchets.
Considérés au départ comme étant des solutions « propres » pour l’environnement et la santé publique, l’enfouissement, le compostage et l’incinération notamment, sont de plus en plus remis en cause par des mouvements écologistes. Pour les écologistes en effet, les incinérateurs sont une menace pour la santé publique. Ils sont une source majeure de dangereux polluants dans l’air, incluant les dioxines, qui sont reconnues comme cancérigènes pour l’Homme et qui sont également liées à des malformations congénitales ; ainsi qu’à d’autres problèmes de santé. Le cas de l’Hôpital Général de Douala n’étant pas isolé. Cet hôpital dont la version des faits du directeur général, a été requise en vain, dans le scandale de la gestion quelconque des déchets d’activité de soins qui finissent dans la nature.
Albert Anatole Ayissi