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Cacao : le label Cameroun broie du noir

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ajafecacaoLe règlement de l’Union européenne sur les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) qui entre en vigueur dès le 1er avril 2013 a des chances de compliquer les choses pour le cacao camerounais qui est déjà dans le collimateur des acheteurs européens. Surtout au su du dernier incident qui a vu le refoulement des ports européens de 2000 tonnes de cacao camerounais, parce que sentant la fumée.

Depuis lors, du côté du ministère du commerce que du Conseil interprofessionnel du cacao et du café (Cicc) ou encore de l’Association nationale des producteurs de cacao et de café (Anpcc), bien qu’on semble y afficher une certaine sérénité, c’est le branle-bas général. Mobilisation, sensibilisation et même répression, les responsables en charge du cacao au Cameroun ne lésinent sur aucun moyen pour redorer le blason du cacao national terni par le cacao non fermenté, mal séché ou simplement séché sur du bitume.

En effet les statistiques de l’Office national du cacao et du café (Oncc) indiquent que pour la campagne 2011-2012, la production commercialisée n’a été que de 207.698 tonnes contre 218.702 tonnes pour la campagne précédente (2010-2011), soit une baisse de 5%.  De même, les exportations qui se situaient à 180 075 tonnes n’ont pas pu dépasser les 9 056 tonnes.

Sur le banc des accusés, l’on retrouve la pratique de séchage de cacao sur le goudron, qu’affectionnent des producteurs de cacao riverains de certains axes routiers, notamment dans la région du Centre, et la vétusté des fours traditionnels de séchage.

Les pouvoirs publics  camerounais ont alors depuis le mois de janvier2013, initié une campagne d’appui et de sensibilisation pour améliorer le séchage du cacao, pour un cacao camerounais exempt des hydrocarbures aromatiques polycycliques, toxine interdite sur le territoire de l’Union européenne. Au cours de ladite campagne, plus d’un millier de bâches de 18 m2 chacune ont été remises gracieusement aux planteurs de cacao du Centre et de l’Ouest du Cameroun. Le ministre du commerce en a profité aussi pour donner une petite leçon aux planteurs qui sont réfractaires aux méthodes de séchage de fèves de cacao recommandées.

Ainsi près de 1300 kg de cacao surpris en plein séchage sur le goudron sur l’axe Yaoundé-Tonga, dans la région du Centre, par la délégation du ministre du Commerce, le 24 janvier 2012, ont été mis au feu publiquement, à Bafia, le chef-lieu du département du Mbam et Inoubou, en présence de quelques producteurs. « Tout cacao qui serait à présent trouvé sur le goudron sera tout simplement saisi et détruit. La loi est claire à ce sujet. Les autorités administratives ici présentes doivent être sans concession à ce sujet. Tout cacao séché sur le goudron doit être saisi et brulé », a martelé le ministre camerounais du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana.

Un coup d’épée dans l’eau 

Une autre source de soucis pour le cacao camerounais est la région du Sud-ouest. L’un des plus grands bassins de production de cacao du Cameroun. C’est de cette région que proviendrait la moitié des 240 000 tonnes de cacao récoltées en 2011, par exemple. Ici, le réchauffement climatique a brouillé le cycle des pluies au point que la récolte du cacao  s‘est faite en pleine mauvaise saison, avec pour conséquence la difficulté de séchage des fèves. Et le plus grave est que « l’immense majorité des 2500 fours construits dans la région par de l’Union européenne, est en décrépitude », affirme  Musima James Lobe, le président du Collège des producteurs de cacao-café du Sud-ouest.

Le gouvernement qui a décidé de prendre le taureau de la qualité du cacao par les cornes n’a pu réhabiliter ici que 140 fours sur 2500. Il est donc clair qu’avec un millier de bâches, et 140 fours réhabilités, il sera très difficile au cacao camerounais, de satisfaire rigoureusement les conditions d’un meilleur cacao attendues par le ministre du commerce : « être fermenté, avoir été séché sur une claie ou sur une aire cimentée aménagée à cet effet ; être propre et exempt de corps étrangers, notamment les particules végétales, animales, minérales ou synthétiques, être dépourvu d’odeur de fumée, de pesticides ou de toute autre odeur étrangère et avoir un taux d’humidité inférieur ou égal à 8%»

En plus du séchage de fèves sur le bitume ou dans des fours à risque, le cacao camerounais a mal aussi sur ses surfaces cultivées. D’après une enquête de la Confédération des Chocolatiers, on distingue d’autres facteurs qui travaillent contre la qualité du cacao camerounais « Les parcelles sont très généralement inférieures à 2 hectares alors que la surface minimum pour qu’un agriculteur vive décemment du cacao est de minimum 6  hectares…  Les vergers sont très mal entretenus, beaucoup de mauvaises herbes au sol qui pompent l’eau de surface. Peu ou mauvaise utilisation des engrais et des fongicides… » . En effet, contrairement aux grands pays producteurs comme la Côte d’Ivoire ou le Ghana où le cacao est cultivé sur des vastes étendues de terres, au Cameroun la culture du cacao est faite par de petits producteurs sur de petites surfaces familiales. (2 hectares maximum).

Bernard Mawo

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