La filière cacao au Cameroun fait face à un bilan mitigé à l’issue de la campagne 2022-2023. Avec une production commerciale de 262 112 tonnes, en baisse de 15% par rapport à l’année précédente, le secteur confirme son ralentissement amorcé depuis plusieurs saisons.
Le Centre, berceau historique de la culture du cacao, demeure la principale région productrice avec 54% des volumes. Toutefois, le Sud-Ouest, affecté par la crise sécuritaire, voit sa contribution diminuer de 40% en un an, représentant désormais 21% de la production. Ensemble, ces deux régions assurent 75% de la production nationale.
Sur le plan de la transformation, 40 unités ont acheté 536 136 tonnes de cacao, produisant 145 047 tonnes de dérivés. Les acteurs industriels tels que Chococam ou Africa Processing Company se concentrent sur les fèves de grade I, tandis que Ferrero travaille exclusivement avec le grade II. Au total, 43% des exportations sont labellisées « Bonnes fermentations ».

Les exportations connaissent également une baisse, passant de 228 000 tonnes lors de la précédente campagne à 186 000 tonnes. La valeur des ventes à l’international s’établit à 264 milliards de FCFA, enregistrant une baisse de 21 milliards. Trois acteurs, à savoir Telcar, Olam et SIC Cacaos, contrôlent plus de 70% des exportations.
Le prix bord-champ, décliné en trois grades, demeure stable, oscillant entre 750 FCFA en moyenne et 1480 FCFA pour le meilleur grade.
Ces chiffres illustrent les difficultés persistantes auxquelles est confrontée la filière, rongée par l’insécurité dans les principales zones de production et la concurrence internationale. Des efforts de relance s’imposent pour redonner de l’élan à cette filière stratégique de l’économie camerounaise.
Le déclin est là, qui sonnera l’alarme ?
La filière cacao au Cameroun se trouve à un carrefour. Les chiffres de la dernière campagne ne laissent aucune place au doute : une production en recul de 15% et des recettes d’exportation en baisse de 21 milliards de FCFA. Le secteur s’enfonce inexorablement. Jusqu’à quand fermerons-nous les yeux sur cette hémorragie silencieuse ?
Derrière ces statistiques se trouvent des hommes et des femmes qui vivent du cacao. Il s’agit principalement des petits producteurs des régions du Centre et du Sud-Ouest, dont le labeur ardu ne suffit même plus à enrayer le déclin.
Dans le même temps, la région du Sud-Ouest, théâtre d’un conflit latent, a vu sa contribution fondre de 40% en un an. Pendant ce temps, les industriels du cacao « de qualité » s’enrichissent au détriment des cultivateurs. Les exportateurs, quant à eux, établissent chaque année des records de ventes vers l’Asie et l’Europe.
Où se situe la richesse dans tout cela ? Certainement pas dans les villages cacaoyers camerounais. La précarité y règne, masquée par les discours rassurants des élites.
Il est grand temps de tirer la sonnette d’alarme et d’agir. Les producteurs de cacao ne doivent pas être considérés comme une variable d’ajustement. Ils sont des maillons essentiels au sein d’une filière qui génère des milliards de revenus. Il est crucial de les soutenir, de les écouter, d’améliorer leurs rendements et leurs conditions de vie.
Le précieux or brun du Cameroun ne doit pas se transformer en fardeau empoisonné pour la jeunesse des régions productrices. Rendons à ce secteur ses lettres de noblesse, lui qui fut longtemps le moteur économique du Cameroun, avant qu’il ne soit trop tard