La filière laitière a-t-elle quelque chance de connaitre un développement certain dans les régions septentrionales du Cameroun ? La question est d’actualité depuis le lancement en novembre 2012 du Programme d’amélioration de la productivité agricole dans sa composante Appui au développement de la filière laitière (PAPA/ADFL).
D’après le Schéma directeur pour le développement des filières de l’élevage au Cameroun, réalisé par le Ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries Animales, « La filière lait au Cameroun bien que disposant d’un potentiel important, reste léthargique». Surtout depuis que la Société de gestion de laiterie (Sogelait) née de la privatisation du projet laitier pilote de N’Gaoundéré met la clé sous le paillasson en 2002. Une situation que les experts commis à la rédaction du document susmentionné attribuent à « une faible performance du matériel génétique local et une dégénérescence du matériel existant ; une dégradation progressive et dangereuse des parcours naturels ; Des initiatives gouvernementales généralement régionalisées ; Une faible adoption des innovations malgré une recherche agronomique et zootechnique dynamique et un état sanitaire peu maîtrisé », entre autres.
En effet, selon la Fao, la production laitière totale nationale est actuellement estimée à 174 000 tonnes. La demande totale du pays plafonnera à 260 000 tonnes en 2015 voire 310 000 tonnes en 2025. A noter que le gap entre la production locale de lait et la consommation est comblé par les produits d’importation. Les chiffres disponibles affirment que le cumul de ce déficit calculé sur la période 2009 à 2015 donne 662 479 tonnes. Soit une perte en devises évaluée à 1 596 milliards de francs.
Le gouvernement camerounais a décidé de tenter une autre expérience de relance de cette filière en lançant le Papa/Adfl. Le but est d’encadrer les exploitations des particuliers des régions septentrionales en vue d’une amélioration qualitative et quantitative de la production laitière.
des traditions séculaires
La question est maintenant de savoir si cette approche peut permettre de parvenir à de résultats meilleurs et durables. Emmanuel Nghenzeko, Ingénieur Agronome, Consultant Indépendant en Agriculture et Développement Rural Durable émet des doutes. Il soutient que la volonté politique de promouvoir la filière laitière nationale a la « faiblesse fondamentale » de s’appuyer sur des populations ayant des traditions séculaires particulières d’élevage de bovins.
Pour lui, dans la région septentrionale du Cameroun, « c’est la vache qui rend des services à son maître et non le contraire » Dans ces contrées , ingénieur agronome Emmanuel Nghenzeko rappelle que « le berger se contente de diriger son troupeau vers les vertes prairies et les sources d’eau, et, c’est parfois par contrainte des agents de l’Etat qu’il consent à faire vacciner ses vaches. Les éleveurs dans ces zones se contentent donc de traire leurs vaches pour avoir du lait pour la famille et de reformer les vielles vaches pour avoir un peu d’argent pour faire face aux gros besoins de la famille. Dans ce contexte, comment imaginer qu’il aille couper des herbes fraîches chaque matin, procéder à l’ensilage, penser au foin, songer aux concentrés ou à cultiver des espèces fourragères… pour booster sa production laitière ? » Des habitudes traditionnelles qui n’offrent pas des opportunités de productions à grande échelle du lait par les particuliers.
Par ailleurs, en dépit de la constitution des Groupements d’initiatives communes (Gic) agropastoraux et autres regroupement d’éleveurs, le Schéma directeur pour le développement des filières de l’élevage au Cameroun évoqué supra précise que « la production est réalisée essentiellement de manière traditionnelle. Le volet moderne représente à peine 2% de la production». C’est dire que des gros efforts en matière de sensibilisation et de formation seront nécessaires pour inverser la tendance afin de prétendre à des rendements satisfaisants.
Josué Yetna
Salut cher journalistes, heureux de faire votre connaissance par le net, je suis content de votre analyse sur mes déclarations qui loin de décourager le développement de la filière laitière traditionnelle, vise aussi à recommander une filière laitière semi-intensive avec « zero-grazing » comme au Rwanda et au Kenya (sur les hautes terre à climat tempéré) pays que nous avons eu la chance de visiter. Nous vous faisons aussi remarquer que les vaches laitières améliorées ont été sélectionnées pour les zones fraîches du monde et au Cameroun on connait où sont localisé ces zones.
Mes encouragements
Emmanuel Nghenzeko