Elles font face à un véritable problème d’emballage, des produits aussi bien dans les marchés que dans les grandes surfaces. Ce qui laisse croire que l’interdiction des emballages plastiques est d’abord une question domestique, mieux encore une affaire de femmes.
Apriori, la chasse désormais ouverte aux emballages plastiques non biodégradables depuis le 1er avril 2014, parait beaucoup plus comme une décision punitive à l’endroit des femmes qu’une mesure visant à protéger l’environnement. Et à raison, puisqu’elles sont beaucoup plus concernées par les courses.
Dès le lendemain de la décision prise par le ministre de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable (Minepded), Pierre Hele, ce qui est désormais la guerre du plastique a commencé au marché central de Douala.
Quelques hommes en tenue ont arraché des emballages plastiques aux « bayams salam » non sans brutaliser quelques unes. Fatima, une jeune cadre dans une entreprise de la place, rendue au marché central aux heures de l’après-midi, s’est entendue répéter à plusieurs reprises que les emballages plastiques ont disparu. « La police est passée ici ce matin et a arraché les stocks d’emballages plastiques que nous avions », a expliqué une vendeuse.
Ces derniers agissaient conformément aux opérations de saisies des emballages en plastique lancées sur le territoire camerounais, et la destruction des cargaisons au frais des contrevenants.
Dès ce moment, le calvaire des femmes concernant les emballages a commencé.
Quelques jours après, c’est dans les supermarchés qu’on a constaté le même scénario. A Bonapriso, au supermarché KADO, les femmes notamment sont aux abois, car la caissière propose des emballages qu’elle qualifie de biodégradable au prix oscillant entre 50 et 200 Fcfa. Refus catégorique de certaines femmes, les plus avisées sortent des emballages de leurs sacs à main. « C’est ce qu’il faut fait», lance la caissière, cachant mal sa gêne par un sourire. A d’autres il est proposé des cartons. Une proposition qui n’arrange pas toujours les ménagères au regard du peu d’achats effectués. Quelques jours plus tard, ces emballages ont disparu et c’est à qui mieux mieux.
Dans les poissonneries, les dés sont également jetés. A Congelcam Douala-bar par exemple, il n’y a pas l’ombre d’un plastique et les ménagères s’arrangent elles-mêmes à emballer la marchandise achetée. Chez leurs confrères de Ndokotti, les poissonniers sont plus compréhensifs et proposent des morceaux découpés des cartons vidés de leur contenu.
Et vive la récup ! Les méthodes varient d’un marché à un autre. A Mahima, un autre supermarché de Douala, sis à Akwa, les marchandises sont emballées dans des plastiques biodégradables.
Difficile ici de savoir si ces emballages sont au frais du consommateur, puisque l‘on paie le montant global ? Les boulangeries ne sont pas en reste. A Ndokotti, seuls les petits pains coûtant 50Fcfa et autres pâtisseries ont droit à l’emballage en plastique, les baguettes tout comme les pains complets ne se prennent pas en charge. Il faut débourser au moins 50Fcfa pour l’emballage biodégradable ou non. Les pharmacies sont l’exception qui confirme la règle, les produits pharmaceutiques ne souffrent pas de cette pénurie de plastiques et sont toujours emballés.
Source de dépenses
L’exigence des emballages biodégradables génère une autre source de dépenses qui, pour certains, parait minime mais représente néanmoins des dépenses en plus pour les ménages. Si à chaque fois qu’on se rend dans une grande surface pour des achats il faut sortir la modique somme de 50 Fcfa pour un emballage, le calcul fait au bout d’un an n’est pas négligeable. Non pas que les acheteurs et consommateurs sont ignorants des dangers liés à l’utilisation des emballages plastiques non biodégradables, mais ce sont les solutions alternatives qui manquent le plus. Si le gouvernement se félicite du fait que la conscience environnementale prend déjà corps avec l’utilisation des emballages en carton.
Toutefois, ces emballages en carton qu’encourage le ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable représentent ce que l’homme de la rue nomme « débrouillé n’est pas volé », d’autant plus qu’on attend toujours la sortie des usines camerounaises des emballages biodégradables.
Surtout que le gouvernement affirme qu’ « Il ne suffit pas de dire que tel type d’emballage est biodégradable, il faut le montrer à travers ses éléments de fabrication parce qu’il y a ceux qui se dégradent après trois mois, d’autres après six, voire un an et plus. Puisque le texte interdit l’utilisation des sachets plastiques de moins de 60 microns, il faut désormais se rassurer sur le type d’emballages biodégradables à choisir pour assainir notre environnement ».
Autant de problèmes qui font dire que le gouvernement a mis la charrue avant les bœufs. Au fil des ans, le Cameroun comme le Tchad sera débarrassé des emballages plastiques non biodégradables, mais il y aura un prix à payer qui partira des fabriques en passant par des marchés et autres grandes surfaces et au final chez les ménagères. Ne dit-on pas qu’on ne fait pas d’omelettes sans casser les œufs ?
Florine Nseumi Léa-Bosangi-