Comment faire pour réaliser le maximum de bénéfice possible avec le peu de farine possible ? Telle est l’équation que les boulangers ou ce qui en tient lieu au Cameroun tentent de résoudre au quotidien. Et, à travers diverses tricheries qui mettent la santé des consommateurs en danger, ils produisent un pain à base du bromate de potassium dont les pouvoirs publics n’ont pas encore pris la mesure de la toxicité.
Il y’a quelques temps, le sac de farine était vendu à 15.500 Fcfa et malgré ce prix acceptable, une certaine catégorie de boulangers s’échinaient à redoubler de techniques frauduleuses pour majorer leurs bénéfices. Aujourd’hui où le prix du même sac de farine est monté à 22.000Fcfa, il est évident que cette fraude va aller crescendo. Surtout avec le veto du ministre du commerce interdisant la hausse du prix du pain telle qu’exigé par le syndicat des boulangers du Cameroun.
Pour réaliser leur pain avec un maximum de profit, certains boulangers, essentiellement ceux qui constituent le gros des troupes des boulangeries clandestines, utilisent encore des levures contenant du bromate de potassium, qui est un additif de panification que les chercheurs qualifient de cancérigène. Le professeur Loïc Louarme renforce cette position en affirmant que « Le bromate de potassium est un additif de panification très employé depuis 1916 à travers le monde. Particulièrement adapté à l’industrialisation du pain, il permet principalement d’augmenter le volume des pains, grâce à une meilleure tolérance des pâtes aux procédés. L’oxydation des thiols (hydrosolubles ou portés par le gluten) est à l’origine de l’effet améliorant du bromate. Son action, qui débute dès le pétrissage, se prolonge durant toute la panification jusqu’à la cuisson. D’un point de vue technologique, le bromate ne présente que des avantages. Cependant, des études ont montré qu’il est potentiellement cancérogène pour le rat, donc probablement pour l’homme. Son interdiction, recommandée par l’OMS, a déjà eu lieu dans certains pays. Toutefois, son remplacement reste difficile. »
Ce pain que l’on rencontre plus dans la métropole économique Douala, est distribué dans des conditions hygiéniques approximatives dans les échoppes des quartiers populaires. On le retrouve aussi dans les gares routières, dans les principaux carrefours de la ville et dans les marchés où il est proposé dans des paniers posés à même le sol, à la merci des poussières. En fait, c’est le pain que consomme la grande majorité de la population camerounaise.
Il faut rappeler que ce pain –là facilement détectable. Il présente une taille normale mais avec cette différence que l’intérieur du pain est vide. Un état de vacuité provoqué par l’ion bromate
Les dommages de l’ion bromate sur la santé ont été démontrés depuis 1982. En effet, C’était en 1982 que l’on a observé des cas de tumeurs cancéreuses chez des rats de laboratoire pour la première fois. Des études subséquentes sur des rats et des souris ont démontré que le bromate cause des tumeurs au niveau des reins, de la tyroïde et d’autres organes Et, depuis lors, de nombreuses associations occidentales à l’instar du Center for Science in the Public Interest (CSPI) un regroupement de consommateurs américains, s’activent pour son interdiction dans la fabrication du pain. C’est ainsi que le bromate a été défendu dans plusieurs pays dont le Royaume-Uni (en 1990) et le Canada (en 1994).
Au Cameroun, les pouvoirs publics ont pris des mesures pour limiter l’utilisation des levures contenant cette substance. Mais ces mesures sont contournées par des boulangers qui trouvent le moyen de se faire livrer des levures prohibées, depuis le Nigeria voisin ou certains pays occidentaux. L’astuce est qu’ils exigent de leurs fournisseurs qu’il soit apposé sur l’emballage la mention « sans bromate ».
Cedric pokam