La capacité de dispersion est un comportement clef chez les organismes vivants : il consiste à pousser un individu à quitter son lieu de naissance pour aller se reproduire dans un nouvel habitat, parfois très éloigné de son lieu de naissance, mais qui lui est plus favorable. Ce comportement, et son évolution, est une étape importante pour comprendre comment les organismes réagissent au changement climatique actuel.
L’équipe « Evolutionary Ecology and Genetics » de l’Earth and Life Institute de l’UCL en étroite collaboration avec le Pr Isabelle Olivieri et Dr Ophélie Ronce de l’université de Montpellier 2 (France) ainsi que du Pr Dries Bonte de l’université de Gand, vient de réaliser une étude qui démontre la validité de certains postulats théoriques développés pour comprendre les raisons pour lesquelles les organismes se dispersent.
L’étude s’est concentrée sur l’étape de « distance parcourue pendant la dispersion ». L’enjeu est de taille: la fragmentation croissante des habitats rend de plus en plus improbable la colonisation de nouveaux habitats si la distance parcourue par les individus disperseurs n’augmente pas. Les chercheurs de l’UCL ont donc voulu tester si les facteurs environnementaux affectant la propension à l’émigration affectent également, et de façon similaire, la distance parcourue par les individus disperseurs.
Ils démontrent pour la première fois que deux facteurs environnementaux, à savoir la densité et le degré de parenté (appelé aussi niveau de proximité génétique) affectent la distance dispersée, et ce de façon quantitative. A savoir, quand la densité ou le degré de parenté augmentent dans un habitat, les organismes augmentent linéairement la distance qu’ils parcourent pour trouver un nouvel habitat favorable. Les chercheurs ont utilisé des outils génétiques (microsatellites), une technique rare pour estimer précisément le niveau de parenté des populations testées, et ont développé un système expérimental permettant de quantifier finement la distance parcourue par l’acarien Tetranychus urticae.
Les résultats obtenus permettent de mieux comprendre, et à terme prédire, le comportement de dispersion des organismes dans un monde sous influence du changement climatique. En biologie de la conservation, ils devraient permettre de mieux prendre en compte les réactions des organismes au changement climatique pour élaborer une stratégie de conservation (choix des zones à protéger en priorité) adaptée.
L’étude vient d’être publiée dans la prestigieuse revue d’écologie « Ecology Letters ».
Isabelle Decoster – isabelle.decoster@uclouvain.be
Article précédemment publié sur http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/72530.htm