Le Protocole de Kyoto, arrivé à échéance en 2012, prévoit l’organisation du marché carbone comme un des mécanismes de lutte contre le réchauffement climatique. Mais les conditions de financement de ce marché s‘apparentent à une organisation mafieuse visant à léser les pays du Sud.
Le financement du marché du carbone découle des mécanismes du Protocole de Kyoto. Il s’agit de favoriser la réduction des émissions de gaz à effet de serre par le financement des investissements des techniques les moins polluantes.
Cette finance du carbone est née de l’idée d’une synergie entre l’environnement et l’énergie dans un contexte de démographie galopante à l’échelle mondiale ce qui suppose un accroissement de la demande énergétique et une augmentation du prix des ressources naturelles. Il faut donc à la fois réduire la dépendance aux énergies fossiles, particulièrement du pétrole, tout en favorisant une meilleure prise de conscience de l’impact du développement humain sur de l’environnement. Considérée comme une nouvelle économie, en phase avec son temps, la finance du carbone est le fruit d’une mondialisation des échanges arrimée au développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication.
C’est l’une des conséquences du Protocole de Kyoto. Ce Traité international signé le 11 décembre 1997 à Kyoto, au Japon, est entré en vigueur le 16 février 2005. Son ambition est de réduire entre 2008 et 2012 de 5, 2% par rapport au niveau de 1990, les émissions de six gaz à effet de serre: dioxyde de carbone, méthane, protoxyde d’azote et les trois substituts des chlorofluorocarbones.
Au 14 janvier 2009, plus de 180 pays avaient déposés leurs instruments de ratification, d’accession, d’approbation ou même d’acceptation. Le protocole de Kyoto vient s’ajouter à la Convention-cadre des Nations Unies sur le réchauffement climatique et dont les Etats membres se réunissent une fois par an depuis 1995, pour faire le point sur la question du changement climatique. L’information via internet permettant l’établissement d’un réseau d’échange de crédits-carbone, à l’échelle de la planète, pour trouver ensemble les voies et moyens nécessaires à la lutte contre le réchauffement climatique. La finance du carbone est donc au cœur de l’économie de savoir.
« Les limites entre la théorie et la pratique »
En principe, le Protocole de Kyoto a tout prévu pour le financement du marché carbone. Deux entreprises se voient attribuer par leur gouvernement un quota d’émissions de gaz à effet de serre. Celle des entreprises qui n’a pas pu réduire ses émissions au niveau arrêté se doit d’acheter des crédits d’émission à l’autre entreprise qui a investi dans la réduction de ses émissions. L’entreprise créditrice d’émissions est récompensée alors que celle débitrice est pénalisée au nom du fameux principe du « Pollueur-payeur ». Les mécanismes de la finance du carbone favorisent l’obtention d’un résultat plus intéressant par rapport à ce qui aurait ; été requis pour investir dans les secteurs où les technologies propres sont moins développées. Dans cette base, plusieurs bourses du carbone ont vu le jour. Elles fonctionnent comme de véritables marchés organisés avec des négociations et des échanges de droits d’émissions de gaz à effet de serre. Ce mécanisme, prévu par le Protocole de Kyoto, ne peut véritablement exister que si les droits attribués sont rigoureusement de même nature au niveau de chaque pays qu’au niveau international.
Mais le système est loin de garantir un fonctionnant équitable. Pour l’autorité, la bourse du carbone permet de réduire les coûts d’adaptation de son industrie à une limite de l’émission: sans bourse, il est difficile à la firme en dessous de son quota d’émissions de continuer à faire des efforts de réduction alors qu’avec une bourse, cet effort de diminution peut toujours se monnayer.
A contrario, une entreprise qui dépasse son quota aura du mal à réduire ses émissions pour acheter des quotas supplémentaires. En fait, les firmes ne peuvent réduire leurs quotas que si la même réduction leur est imposée. Par ailleurs, quid des, règles définissant les droits? Sont-ils au pas achetables par des non utilisateurs, les Etats émetteurs? Une telle bourse ne risquerait-elle pas à terme de donner lieu à des spéculations?
Enfin, rien n’empêche les droits acquis à titre onéreux ou gratuit d’être échangeables ensuite. Ce qui est indépendant avec le principe même de la bourse et n’est pas incompatible avec le mécanisme de taxation des émissions.
« Un marché de dupes »
Certes, ce type de marché existe déjà en Europe. Mais l’Europe n’est pas le monde même si elle fait partie de la planète. Par ailleurs, le mécanisme européen du marché de carbone s’est mis en place par étapes successives. La phase pilote 2005- 2007 a servi de test. Ce n’est qu’en 2008-2012 que le principe a été généralisé.
Surtout, au début de chaque phase, chaque Etat élabore un Plan National d’Allocations des Quotas (PNAQ) qui doit être approuvé par la Commission Européenne. Les installations fixes d’une puissance supérieure à 20 MW se voient attribuer des quotas d’émissions.
La sanction pour une entreprise qui émet sans disposer de permis est passée de 40 euros, au début de l’expérience, à 100 euros assortis de l’obligation d’acheter des permis pour se mettre en règle aujourd’hui. La quatrième édition du Forum africain de Carbone, en avril 2012 à Addis Abeba, la capitale éthiopienne, a réuni un bon millier de participants pour faire avancer le marché du carbone et le changement climatique en Afrique. Cofinancé par la Banque Africaine de Développement, cette rencontre a planché notamment sur « la maîtrise du carbone et l’investissement en Afrique ».
Pendant trois jours, les participants ont insisté sur le potentiel de représente l’Afrique dans le lutte contre le changement climatique et ses opportunités pour développer l’or vert. Il a beaucoup été question lors de ce forum, de la simplification des règles de financement pour le pays à faible revenu, du Mécanisme de développement propre(MDP).
L’une des conclusions de cette rencontre visait, à travers le Mécanisme de développement propre, de permettre aux projets de réductions des émissions dans les pays en développement d’obtenir des certificats de réduction des émissions, équivalent chacun à une tonne de CO2. Ces certificats peuvent être vendus, échangés et utilisés par les pays industrialisés pour atteindre leurs objectifs de réduction dans le cadre du Protocole de Kyoto. Sous prétexte que ce mécanisme « stimule le développement durable et la réduction des émissions », il est quasi certain qu’il va encore plus accroître le fossé entre les pays industrialisés qui sont par ailleurs les plus pollueurs de la planète et les pays en développement qui polluent le moins. Une véritable supercherie que les pays africains doivent dénoncer tout en exigeant que le principe « Pollueur-payeur » soit en définitive, appliqué..
Janvier NGWANZA OWONO-Bosangi-