La coupe sauvage entretenue par certains opérateurs forestiers, associée à d’autres ravages tels ceux orchestrés par les fabricants de charbon de bois et les promoteurs de palmeraies, menacent la survie de la forêt autour des villes.
L’arrondissement de Logbadjeck dans le département de la Sanaga-maritime situé sur la rive gauche du Fleuve Dibamba et qui est frontalier avec l’arrondissement de Douala 3e dans le département du Wouri, constituait il y a encore quelques années, une importante zone de forêt autour de la métropole économique du Cameroun. Mais depuis cinq ans, cette zone est infestée par une foule de prédateurs qui vont des exploitants forestiers (pour la plupart clandestins) aux fabricants de charbon de bois en passant par des promoteurs d’exploitations agricoles, et mêmes des promoteurs immobiliers qui voient dans cette zone, une future banlieue de Douala. C’est alors que le prix de l’hectare de terrain (quasiment dépourvu de véritables arbres) qui était ici de moins de 50.000 FCFA, il y a moins de dix ans caracole aujourd’hui entre sept cent mille à un million de FCFA.
Plantations de pastèques, palmeraies, bananeraies, se disputent la vedette. C’est à qui dévastera le plus la forêt pour avoir la plus grande plantation. A coté de cette déforestation accélérée, l’on doit ajouter les feux de brousse des agriculteurs, et plus grave ceux de la horde qui fabrique le charbon de bois, très prisé à Douala et dans diverses autres villes du Cameroun. En fait, la demande est permanente et croissante. C’est l’offre qui est souvent insuffisante. « Même si vous avez 1000 sacs, il suffit d’appeler deux ou trois personnes, on viendra tout ramasser», affirme un Barthelemy, qui depuis sa mise en congé technique en 1989 dans une entreprise de la place, s’est lancée dans la fabrication du charbon.
Accusés de détruire l’environnement, les uns et les autres se rejettent la responsabilité. Les exploitants forestiers ou ce qui en tient lieu, sortent la bonne vieille rengaine qui affirme que « l’agriculture est une des plus grandes causes de la déforestation ». Seulement lorsqu’on leur rétorque qu’ici même les bois sous-diamètre sont coupés, M. Lissom qui opère comme exploitant forestier manque d’arguments pour se défendre. En effet, dans cette zone, les forestiers coupent indifféremment le bois sans tenir compte de leur maturité. Les jeunes arbres alimentent les étals des vendeurs de bois de chauffage tandis que le bois des arbres un peu plus mature ravitaille les dépôts de bois de Douala.
Les uns et les autres acteurs de la déforestation ici, mettant en avant l’argument économique, déploient tellement d’énergie qu’il n’y en a plus pour longtemps pour en finir avec cette forêt qui borde la ville de Douala. En effet, personne ne se soucie ici de l’avertissement de Dr. Denis Sonwa du Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR) à Yaoundé sur « l’importance des forêts ou de la végétation autour des villes. Les produits que cela peut donner aux populations des villages concernés et celles des villes ; les services écologiques qu’on peut tirer sont enlevés. La biomasse qui est extraite de ce milieu. Il est urgent de voir comment l’on peut planifier la durabilité. Ce qui veut dire avoir des initiatives pour essayer de reforester autant que possible dans le milieu.»
Les pouvoirs publics peuvent-ils mettre un terme à cette dévastation de la forêt et préserver ce qu’il en reste voire engager une régénération des arbres détruits ? La question est de mise.
Josué Yetna