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Agriculture : quand le rendement plombe l’environnement

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la patateL’activité agricole occupe désormais 40% des terres de la planète et fait travailler 43% de l’humanité. Les impacts environnementaux de la modernisation et de l’intensification de l’agriculture sont bien connus. Ce sont notamment la dégradation des écosystèmes, la diminution de la biodiversité, les émissions de gaz à effet de serre, l’appauvrissement des sols, la pollution aux engrais et aux insecticides.

Les cultures et les pâturages s’étendent sur près de 40% de la surface terrestre (5 milliards d’hectares environ), dont 70% sont destinées à l’élevage, complétées par les espaces forestiers et des terres boisées plus ou moins exploitées. Agriculteurs et éleveurs sont les principaux gestionnaires de ressources naturelles du monde. Ils représentent 43% de la population active mondiale, 6% dans les pays riches et 53% dans les pays en développement. En partie responsable de la dégradation des écosystèmes, l’agriculture en subit aussi pleinement les conséquences. Les pratiques agricoles sont très variées.

Les pays industrialisés pratiquent une agriculture intensive, largement mécanisée et subventionnée. Dans les pays émergeants et les pays industrialisés du groupe de Cairns, c’est aussi une agriculture intensive et mécanisée, mais elle n’est pas subventionnée et a recours de façon très variable aux intrants (pesticides, engrais). Dans les pays en développement, elle est peu à très peu mécanisée, utilise peu d’intrants, et peut être subventionnée, comme en Inde. Elle est, pour les productions majeures (blé, riz, café, etc.), fortement dépendante des fluctuations des prix mondiaux.

En zone de montage et en zone semi-aride, l’élevage, conduit avec de bonnes pratiques, a de nombreux avantages : valorisation d’une biomasse pauvre, inutilisable pour d’autres activités, par la production de produits de haute qualité, gestion du paysage, fourniture d’emplois et de revenu. L’agriculture des pays développés s’insère dans un secteur très large, l’agro-industrie, qui inclue les entreprises placées en amont (banques, machinisme agricole, semenciers, industries agrochimiques pour les engrais et pesticides) et en aval (industrie agroalimentaire, grande distribution). À l’opposé, l’agriculture dans les pays en développement demeure plus ancrée aux marchés locaux de produits alimentaires sauf dans les régions où les cultures d’exportation des produits tropicaux sont très présentes (cacao, café, coton, fleurs, etc.). Cependant, les exportations de produits agricoles de ces pays, qui représentaient 50% de leur production au début des années 60, se situent à moins de 7 % depuis 2000.

Les Philippines par exemple produisait jusqu’en 1994 l’alimentation nécessaire à sa consommation nationale et pouvait même en exporter une partie. Depuis 1995, le pays doit importer de la nourriture. Dans tous les cas, l’agriculture reste un moyen de subsistance et de développement pour les trois quarts des habitants pauvres qui sont des ruraux.

En Afrique sub-saharienne, l’agriculture emploie 65% de la population active et génère 32% du PIB. Et d’ici 2025, selon les Nations Unies, les deux tiers des terres cultivables africaines pourraient ne plus être productives suite à la dégradation des sols. On estime à 200 millions le nombre de personnes pour lesquelles le pâturage est la seule source de moyens d’existence possible.

La révolution verte.

Au cours des 15 dernières années, la production nette agricole a enregistré une croissance annuelle de 2,2%, avec 3,4% pour les pays en développement et 0,2% pour les pays développés. En 2006, la production animale a représenté près de 40% de la valeur totale de cette production. La part de l’agriculture dans le commerce mondial des marchandises est passée de 25% dans les années 1960 à 7% en 2007 et de 8% à 4% du produit intérieur brut mondial. Les profonds changements qui ont bouleversé l’agriculture au cours du XXe siècle, qualifiés de « révolution verte », s’ils se sont accompagnés d’une considérable augmentation des rendements et de la productivité du travail, ont aussi eu de graves conséquences sur l’environnement. Le secteur agricole est responsable de 20 à 30% au moins des émissions de gaz à effet de serre, principalement dues à l’élevage des ruminants et aux rizières. Il représente l’une des principales causes de pollution des eaux et de dégradation des sols. L’expansion des terres agricoles se fait au détriment de la forêt. Dans les années 90, 70% de la déforestation a été causée par une conversion en terres agricoles.

Chaque année, 15 millions d’hectares sont détruits, essentiellement des surfaces de forêts équatoriales et tropicales remplacées par de l’élevage ou des plantations de palmiers et de soja. De même, l’expansion des terres agricoles est le principal facteur d’appauvrissement de la biodiversité, par la destruction des habitats, les pollutions, etc. Les pratiques de sélection des espèces domestiques visant à créer des races très productives ont conduit à une érosion génétique : 75% de la diversité des espèces végétales cultivées et des variétés ont disparu des champs au XXe siècle ; 90% de la production agricole se concentre aujourd’hui sur 30 espèces végétales et 14 espèces animales, une menace pour la sécurité alimentaire.

10 à 20 Kg d’engrais à l’hectare en Afrique

Le secteur agricole emploie plus d’individus, occupe plus d’espace et utilise plus d’eau que tout autre activité humaine. Il consomme entre 70 et 80% des ressources mondiales en eau (nappes, eau de surface stockée), principalement pour l’irrigation. L’agriculture pluviale reste cependant majoritaire, les pluies pouvant apporter chaque année aux cultures l’équivalent de 5000 km3 d’eau, l’apport de l’irrigation représentant environ 1800 km3 par an. Les surfaces irriguées ont augmenté de 65% au cours des trente dernières années pour atteindre 20% des terres cultivées.

En Afrique subsaharienne, seulement 4% des superficies exploitées sont irriguées, contre 42% en Asie. La faible maîtrise du drainage associée à de mauvaises pratiques d’irrigation ont provoqué la salinisation d’environ 10% des terres irriguées dans le monde. Au cours de la même période, la consommation mondiale d’engrais a plus que doublé, avec de grandes disparités : 200 kg à l’hectare en Europe, en Chine et au Japon, 10 à 20 kg dans les pays de l’Afrique sub-saharienne et de l’ex-URSS. En 2006, l’agriculture biologique était pratiquée sur 31 millions d’hectares de cultures et de pâturages certifiés, dans 120 pays. Elle représentait un marché de 40 milliards de dollars, soit 2% des ventes mondiales de produits alimentaires. La production de produits certifiés en bio provient aussi de prélèvements dans des espaces naturels que la FAO estime à plus de 60 millions d’hectares. La demande des consommateurs pour les produits biologiques est en hausse, surtout aux Etats-Unis et en Europe, mais aussi en Chine, Inde et Brésil. En Chine, les surfaces en bio sont passées de 340.000 hectares en 2003 à un million en 2005.

Amadou M. Cissé

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