L’agriculture « bio » pourrait-elle adoucir le problème de la faim dans le monde ? Probablement, argumentent les Nations Unies au fil d’un double rapport. Cette agriculture, plus vraiment traditionnelle, améliorée et débarrassée de produits chimiques, fertilisants et pesticides, permettrait à beaucoup de paysans du monde en développement de doubler leur production de nourriture en une petite dizaine d’années.Cette proposition colle au profil d’agriculteurs, qui travaillent sur des petites structures, faciles à réformer. Elle répond aussi au contexte toujours alarmant de la faim dans le monde. Au cours des 10 dernières années, les progrès pour réduire le nombre d’affamés ont été lents, et inégaux, à l’échelle de la planète. Avec un zoom sur l’Afrique sub-sahélienne, où la faim a progressé de 20% depuis 1990.Au début des années 2000, 33% de la population du Kenya manque encore de nourriture, 19% en Ouganda, jusqu’à 44% en Tanzanie.
Cette agriculture «soft», qui décline les lois du Développement durable – « capital naturel », nourriture, bois, eau ; « capital social », le travailler ensemble ; « capital humain », valoriser le savoir de chacun ; « capital financier », se tirer hors de la pauvreté -entend bien montrer qu’elle peut aussi faire grimper la productivité. Expérimentée dans plus d’une cinquantaine de pays, elle a prouvé que les récoltes, issues de semences traditionnelles et protégées avec des méthodes naturelles, pouvaient augmenter leur rendement de 80%, en moyenne.
Quelques petits îlots d’agriculture « bio », développés sur le continent africain, présentent des récoltes augmentées de 116%, en moyenne. Jusqu’à 128% en Afrique de l’Est. Avec des disparités, +179% au Kenya, + 67% en Tanzanie, et +54% en Ouganda. Ces chiffres, issus de projets très encadrés, promettent plus de nourriture dans les pays où l’on en manque. C’est vrai en Afrique sub-sahélienne.
Rendements prometteurs et petites surfaces.
Retour au Kenya où un projet conduit par le SACDEP (Sustainable Agriculture Community Development Programme) a initié 30.000 petits fermiers à l’agriculture durable. Avant de concentrer son action sur 4500 exploitants installés à l’Est et au Centre du pays. Ces pionniers ont été formés à quelques règles : mauvaises herbes, maladies, et parasites combattus avec des défenses naturelles – Par exemple, des plantes qui attrapent ou repoussent les insectes -; respect des sols pour regagner en fertilité; gestion optimale de l’eau ; et reproduction des semences.
Quatre années plus tard, la SACDEP rapporte une productivité augmentée de 50%. Suffisamment pour se nourrir, avec un petit supplément destiné à la vente. L’Ethiopie, en proie à de graves problèmes de malnutrition, a amélioré de 70% l’accès à la nourriture dans le cadre de projets agricoles « bio ». En Ouganda, qui exporte une partie de sa production, ananas, gingembre, ou vanille, le « bio » a permis de pratiquement doubler l’accès à la nourriture. Mais attention, si ce type d’agriculture progresse depuis 2003, il ne représente que 2% du paysage agricole de l’Ouganda.
A l’échelle de l’Afrique, les terres qui bénéficient d’une gestion certifiée « bio » rampent entre 1 et 3% des surfaces cultivées. Au Malawi, autre petit terrain d’expérimentation, les rendements ont été multipliés par 2. Le problème, c’est de diffuser ces méthodes agricoles « soft ». Quelques formations supérieures existent en Afrique du Sud, trop peu sur le reste du continent. Alors ONG dépêchent experts, techniciens, ou fermiers sur le terrain, qui en formeront d’autres, à des techniques souvent simples.
Dommage, l’engagement des gouvernements fait souvent défaut. L’apprentissage et à la mise en œuvre de cette mutation agricole, même à petite échelle, demandent du temps. Au Kenya, la SACDEP a mis une petite quinzaine d’années pour développer son programme.
M.J
Cet article a précédemment publié sur webpedagogique.